Observer les vaches pour identifier les boiteries en élevage
Quelques simples observations permettent de détecter si une vache boite ou non. L’UMT Maitrise de la Santé des troupeaux bovins a mis en place un système de notation sur trois critères (2014) : le soulagement du pied, la qualité des aplombs postérieurs et la ligne de dos. Les postures sont classées en trois catégories (cf photos et schémas) :
- Posture saine : les pieds posent bien au sol, la ligne de dos est droite et les membres postérieurs sont parallèles
- Posture « atteinte modérée » : les pieds posent bien au sol mais il y a une légère rotation des membres postérieurs et la ligne du dos est arquée.
- Posture « atteinte sévère » : suppression d’appui d’un des pieds, appui en pince ou rotations importantes des pieds postérieurs
De 130 € à 880 € de pertes selon la gravité
Les boiteries impactent négativement les performances zootechniques (chute d’ingestion, de production de lait, problèmes de reproduction…) et les pertes économiques sont multiples : temps passé aux soins, frais vétérinaires, réformes précoces …(Bouichon, 2008) (cf graphique 1). Ainsi, une boiterie induit des pertes économiques entre 130€ et 880 € selon sa gravité (cf graphique 2).
La prévention de boiteries commence dans la stabulation et à l’auge
Pour prévenir et lutter contre les boiteries, il est nécessaire d’identifier la cause de la boiterie, et les facteurs de risque de la maladie identifiée.
Des maladies infectieuses principalement
Les boiteries basses sont associées à 7 lésions principales, couramment classées en deux catégories (cf tableau dernière page) : les lésions infectieuses (fourchet, maladie de Mortellaro, panaris, abcès de la sole) et les lésions non-infectieuses (bleime diffuse, ouverture de la ligne blanche, ulcère de la sole/cerise).
Des facteurs de risque dans l’environnement
Des conditions de vie dégradées peuvent engendrer l’apparition de lésions et le développement de pathogènes, favorables aux maladies infectieuses responsables de boiteries.
Organisation des espaces de vie
La surface de l’aire d’exercice, la place devant le robot de traite ou les abreuvoirs, les virages présents dans les circuits de déplacement constituent l’espaces de vie des animaux. Si le bâtiment est mal organisé, la compétition entre animaux peut entrainer des mouvements brusques provoquant des lésions aux onglons.
Dans un second temps, l’augmentation de la position « debout » (>12h) induit une surcharge de poids sur les onglons et amplifie le risque de lésions podales.
Cette réduction du temps de couchage peut provenir d’un manque de confort des zones de couchage (Cf tableau 1), d’une conception inadaptée du bâtiment (logettes, auge, barre au garrot, couloirs) ou d’une surdensité (nombre insuffisant de logettes, surface d’aire paillée inadaptée).
Qualité des sols
Les boiteries sont favorisées par des sols glissants ; des objets contendants ou des surfaces irrégulières à l’origine de traumatismes (cailloux sur des chemin pour accéder à la pâture…) ; des sols abrasifs qui entrainent une usure excessive de la corne ; un défaut de neutralisation des bétons, qui rend la corne friable et moins résistante.
Humidité et hygiène des aires de vie
Les conditions humides ramollissent la corne, favorisent la multiplication des bactéries et la contamination des pieds. Un défaut de raclage, un curage et/ou un paillage insuffisant, des abreuvoirs près des aires de couchage, une mauvaise ventilation du bâtiment sont des facteurs dégradant l’hygiène, favorisant l’humidité et le développement des germes dans l’environnement.
Les paramètres liés à la nutrition
Les équilibres en nutriments, macro-, oligo-éléments et vitamines sont essentiels dans la lutte contre les boiteries : qu’elles soient d’origine infectieuses ou non infectieuses.
Conduite alimentaire des vaches en lactation
La maitrise des risques de déficit en énergie, d’acidose et d’acétonémie est essentielle en élevage pour limiter la mobilisation des graisses corporelles et diminuer la prévalence des boiteries non infectieuses. En effet, un coussinet plantaire se trouve entre l’os et la corne au niveau du pied de la vache. Son rôle est d’absorber la pression de l’os pour que ce dernier n’appuie pas sur la corne et n’impacte pas le pododerme (tissu qui synthétise la corne). En cas de perte d’état, ce coussinet, principalement composé de graisse, diminue et n’absorbe plus suffisamment la pression : la douleur provoque une boiterie.
L’apport en minéraux et vitamines
Des apports suffisants en macroéléments, en oligoéléments et en vitamines sont indispensables dans la lutte contre les boiteries. Dans un premier temps, le Zinc, le Cuivre, le Manganèse et la vitamine B8 (biotine) interviennent dans la formation du derme et de l’onglon. Un apport suffisant est nécessaire à sa bonne qualité et limite l’apparition de lésions « portes d’entrée » pour des pathogènes dans le cadre de maladies infectieuses et permet une bonne cicatrisation. La forme d’apport conditionne l’absorption de ces oligo-éléments, ainsi certaines formes de chélates sont plus absorbables par l’animal que des oxydes et sulfates par exemple. Dans un second temps, l’apport de vitamines B, D, E et de sélénium permet de soutenir l’immunité de la vache sollicitée lors d’une infection, favorisant alors la guérison.
Hygiène et parage des pieds : la régularité est la meilleure des pratiques.
La régularité est la meilleure des pratiques pour lutter contre les boiteries, tant au niveau de l’hygiène des pieds (donc des sols), de l’entretien du pédiluve et du parage fonctionnel.
Désinfection des pattes : il n’existe pas de solution miracle
Préventive ou curative, l’efficacité de la gestion des lésions infectieuses (fourchet et dermatite digitée) nécessite le recours à des traitements collectifs. Quel que soit le produit, des règles sont à respecter pour atteindre une efficacité maximale : des pattes propres avant la désinfection, des sols propres et secs au moins pendant 30 minutes après la désinfection, de la régularité dans les traitements : 2 fois par jour, pendant deux jours consécutifs tous les 15 jours.
Si un pédiluve est utilisé : choisir des dimensions et un emplacement adaptés
Le pédiluve doit être placé dans à un endroit éclairé, à l’écart d’une marche ou d’un angle. La solution désinfectante doit être renouvelée régulièrement : tous les 100 à 150 passages au maximum et son niveau doit être suffisant pour recouvrir complètement les quatre pieds de la vache jusqu’aux onglons accessoires.
Le parage, une action à double niveau
Le parage est une action préventive et/ou curative qui vise à réduire les boiteries dues aux affections des onglons. Le parage préventif ou fonctionnel consiste à tailler les onglons afin d’assurer leurs fonctions de protection des tissus et de support du poids de l’animal. Il est préconisé de réaliser un à deux parages par an et par vache selon les conditions d’élevage (qualité du couchage, type de sol, densité, pâturage…). Le parage curatif consiste, après détection d’une boiterie, à empêcher l’introduction de corps étrangers dans la lésion détectée ainsi qu’à mettre au repos l’onglon lésé.